Odorologie : des criminels trahis par leurs odeurs corporelles
Le tireur dans l'assassinat de deux jeunes gardes civils espagnols à Capbreton (Landes) en 2007, Mikel Kabikoitz Carrera Sarobe, a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Une femme, membre du commando, Saioa Sanchez Iturregui, a été condamnée à 28 ans de réclusion criminelle, alors qu'un troisième etarra, Asier Bengoa Lopez de Armentia, présenté par l'accusation comme faisant partie de l'équipe, a été acquitté de ces charges mais néanmoins condamné pour d'autres faits à 15 ans de réclusion.
Un peu avant ce verdict, la défense avait souligné l'absence de preuve permettant d'établir sa présence à Capbreton ainsi qu'à Haut-Mauco (Landes), où trois etarras avaient enlevé une femme dans son véhicule moins de deux heures après le double assassinat.
Après onze heures de délibérations, le jury a notamment écarté les analyses d'odorologie (technique de la police scientifique )qui seules pointaient la présence de M. Bengoa dans la cafétéria attenante au parking où a eu lieu le double assassinat. Les magistrats semblaient méconnaître cette technique de la police scientifique qui fait pourtant partie depuis 1999 de l'arsenal d'expertises à la disposition de la Police Française.
L'avocat de la défense, et il est dans son rôle, a estimé que cette technique était, selon lui, "empirique" (faux : le protocole de l'odorologie est validé par Interpol et bientôt par le CNRS) et que jamais à ce jour une cour française n'a condamné sur la seule base de l'odorologie... En tout cas, le bénéfice du doute sur l'efficacité ou non de l'odorologie a pu profiter au "troisième homme" qui continuait de nier sa présence sur les lieux.
Ce qui est vrai, c'est que l'odorologie seule ne suffit pas. Mais si les prélèvements sont effectués dans les 96 heures, et que l'enquête abouti vers des suspects, elle peut confirmer ou infirmer leur présence sur le lieu des prélèvements. Et dans le cas des étarras, les 4 chiens auraient reconnu (selon le compte rendu du procès) les odeurs corporelles des trois suspects...
C'est une technique importée de Hongrie et est opérationnelle en France depuis 2000 au sein de la sous-direction de la police technique et scientifique d'Ecully (Rhône). La technique consiste à prélever, à l'aide de tissus (importés de Hongrie) des odeurs corporelles laissées sur tout support (fauteuil, téléphone portable, arme...) sur une scène de crime.
Dans le cadre de l'enquête sur l'assassinat des gardes civils, il s'agissait, en l'occurrence, des chaises de la cafétéria attenante au parking où a été commis le double assassinat. On y a prélevé des odeurs sur des bandes de tissus qui ont été placées en bocaux stérilisés en attendant que l'enquête s'oriente vers une suspect.
L'opération est renouvelée deux fois pour chaque chien. Si les deux chiens retiennent deux fois chacun la même odeur, l'identification est considérée comme concluante.
L'équipe de cinq personnes qui travaille sous ses ordres compte un ingénieur, qui a agrégé toutes les publications répertoriées sur le sujet. Toutes montrent que l'odeur humaine a "une empreinte propre et individuelle", qui ne peut être confondue avec aucune autre, selon lui.
Pour en savoir plus sur le travail des équipes d'odorologie, regardez le reportage de France 2 ...ou lisez le chapitre consacré à l'odorologie dans le livre : Manipulations Olfactives, enquête sur ces odeurs qui séduisent, guérissent et trahissent..." chez Payot.